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Nos Voisins Lointains 3.11

Lettre d'une mère au Premier Ministre et au Préfet de Fukushima

Lettre adressée à M. le Premier Ministre, Shinzo ABE et M. le Préfet de Fukushima, Masao UCHIBORI, de la part de Mme Akiko MORIMATSU, mère déplacée suite à l’accident de Fukushima Daiichi, représentant des plaignants du procès de la région de Kansai contre la TEPCO et l'Etat. *********

Le 26 mai 2015 Je m’appelle Akiko MORIMATSU déplacée et installée avec deux enfants à la ville d’Osaka depuis 4 ans, après avoir quitté la ville de Koriyama de la préfecture de Fukushima suite à l’accident nucléaire. Le droit à la santé est un des droits les plus fondamentaux de l’homme. Je pense qu’il doit être accordé égalitairement à tout le monde. Vouloir éviter l’irradiation va de soi, et tout le monde doit pouvoir jouir de ce droit. Il est aussi tout à fait naturel pour les parents de vouloir faire éviter le risque sanitaire aux enfants qui représentent l’avenir. Il n’y a aucun parent qui ne souhaite pas regarder l’enfant grandir sainement. Il n’y doit pas avoir ni la peur de l’irradiation ni l’angoisse de problème sanitaire. Est-il acceptable que seulement les gens ayant des parents, des connaissances ou des gens qui leur apportent le secours, ou disposant des conditions financières puissent s’éloigner de l’irradiation ? Les politiques récentes, par exemple l’arrêt d’aide d’hébergement aux déplacés (en parallèle avec l’aide importante accordée à ceux qui acceptent le retour) sont-elles mises en place tout en sachant que beaucoup de ménages n’ont pas d’autre option que retourner au domicile d’origine avec les enfants, alors que tout ce qu’ils souhaitent est d’éviter le risque d’exposer les enfants à la radiation? Peut-on appeler cela une politique juste et égalitaire ? Je me demande si la justice existe vraiment. La préfecture de Fukushima et le gouvernement central se rendent-ils compte du fait que depuis 4 ans, il n’y a aucun dispositif qui permette aux sinistrés de continuer la vie de déplacement sans souci ? Savent-ils qu’il existe des ménages qui n’arrivent pas à se déplacer parce qu’ils n’ont pas de moyens ? Si vous ne vous en rendez pas compte, cela signifie que vous avez failli entendre « les voix silencieuses », c’est-à-dire les voix des personnes menant une vie ordinaire. Dans ce cas, permettez moi de vous dire que vous ne méritez pas d’être chefs des gouvernements. Il existe bien l’Acte concernant la promotion des mesures pour fournir le soutien aux victimes de l’accident nucléaire de TEPCO (genpatsu kodomo hisaisha shienho) (Acte N° 48 du 27 juin 2012, NdT), mais il n’a jamais été mis en œuvre. La loi existe, toutefois les victimes sont laissées à elles-mêmes. C’est cela la réalité. Je n’ai jamais mis en cause les personnes qui ont choisi de rester à Fukushima et de faire face à la radiation dans la vie quotidienne. Je sympathise en tant qu’un parent ayant des enfants à protéger. En même temps, le fait d’avoir quitté Fukushima ne change rien de notre statut en tant que ressortissant de la préfecture de Fukushima. Nous sommes partis de Fukushima pour nous refugier dans les lieux lointains avec les enfants, mais si Fukushima redevient comme avant la catastrophe, c’est-à-dire un lieu sans risque sanitaire, nous regagnerons vite Fukushima afin de reprendre la vie que nous avons du interrompre si brutalement. C’est notre souhait cher depuis ces 4 ans. J’avais écrit une lettre de contenu similaire au M. le Préfet précédent, M. Yuhei SATO, accompagnée du livre de mémoire du déplacement que j’avais publié. Avez vous entendu les voix de ressortissants de la préfecture de Fukushima ? M. le Préfet UCHIBORI qui a succédé à M. SATO, je vous prie de bien vouloir respecter les droits fondamentaux de l’homme à la vie et à la santé sans délaisser un seul des ressortissants, y compris ceux qui ont choisi de se déplacer. Veuillez continuer et mettre en œuvre les politiques d’aide auprès des déplacés. J’ai peur que les politiques réalisées depuis l’accident nucléaire de Fukushima Daiichi n’aillent servir d’exemple, et que les droits des citoyens japonais soient violés dans l’avenir. Y a-t-il des choses qui sont plus importantes que la vie humaine et la santé ? Nous, les citoyens possédons le droit de pouvoir protéger notre vie et jouir de la santé. Tous les actes pour sauvegarder ce droit sont des actes primordiaux, et je vous prie de bien vouloir instituer le minimum de protection auprès des personnes ayant exécuté ces actes. C’est notre grand malheur d’avoir l’expérience de la catastrophe nucléaire. En tant que ressortissants de Fukushima et du Japon, nous souhaitons prendre les actions que nous ne regretterons pas face à la génération future, main dans la main avec les autres ressortissants et avec l’administration locale. Nous espérons que ces actions soient en concordance avec la politique nationale. Pour cela, je vous prie d’écouter, non seulement les voix qui insistent sur les intérêts économiques et financiers, mais aussi celles des mères - qui parlent du sens commun -, des personnes ordinaires, des ressortissants de Fukushima et des citoyens japonais.

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